Philosophie

Le principe coopération

Aucune cellule ne peut exister sans collaborer avec une multitude d’autres cellules. A la base du vivant est donc le principe de la coopération. De même bien sûr pour les gènes. Les 30 000 gènes du corps de l’humain ne peuvent fonctionner que par des processus de collaboration et en coopération avec une multitude de facteurs extérieurs. Plus que 99 % de nos gènes à l’intérieur de l’humanité sont identique. Les scientifiques disent actuellement que l’environnement règle les gènes. A la base de ce constat, les scientifiques ont commencé à étudier cette coopération sur tous les niveaux. Ils nous disent que l’être humain est, de par sa nature, un être de coopération, les gènes coopèrent, dans le comportement quotidien, on coopère. Il n’est pas possible d’exister sans coopérer. Il est très important de trouver des formes de coopération qui nous permettent de réussir nos relations, dans le couple, dans l’éducation, dans la vie professionnelle. Comme nous avons vu, le facteur environnement joue un très grand rôle dans l’éducation. Nous savons que la confiance que l’enfant ressent tout au début de sa vie, va influencer sa manière de confronter les différents problèmes de la vie. LES BASES DE LA PSYCHOLOGIE DU CHANGEMENT : L’HUMANISME ET L’ENTRAIDE

PIERRE KROPOTKINE
En 1904, Pierre Kropotkine développa dans son livre « Entraide dans l’évolution » une théorie de la coopération dans le développement de la nature animale et humaine. Les découvertes initiales de Darwin trouveront une interprétation humaniste par P. Kropotkine qui pose les bases scientifiques de l’idée d’une vie commune solidaire et paisible des hommes. Les anthropologues actuels le confirment : la coopération, l’entraide et la solidarité sont la base de tout développement évolutif chez l’être humain.

PIERRE RAMUS
Selon Pierre Ramus, les bases d’une réorganisation sociale sont le consensus, la solidarité et l’humanisme, l’amour du prochain et l’activité et la responsabilisation de chaque membre de la communauté. Celui qui possède plus que l’autre est tenu de partager librement avec lui. Sans privilèges et prérequis, les individus d’une communauté libre savent qu’ils ne sont égaux que parmi les égaux.
ALFRED ADLER
Pour Alfred Adler, l’enfant est dès sa naissance un être social, ses capacités et besoins sont centrés sur un contact étroit avec son environnement affectif. Sur cette base, une relation sociale et émotionnelle étroite se construit avec la personne soignante la plus importante, en général la mère. Cet attachement affectif offre à l’enfant la sécurité nécessaire et constitue une base indispensable pour son développement futur.

FRIEDRICH LIEBLING
Le chercheur en psychologie qui a le plus contribué à l’approche est Friedrich Liebling. Dans un travail psychothérapeutique de plus de 30 années, Friedrich Liebling a démontré dans son Ecole de Zürich que l’être humain peut vivre l’entraide sur une très grande échelle, plus de 2000 personnes se réunissaient lors des colloques annuels pour partager leurs réflexions. De plus, à notre connaissance, il est le seul psychologue à avoir développé une méthode pour enseigner la psychologie, pas seulement dans un discours universitaire, mais aussi dans un processus d’intégration et d’appropriation au niveau individuel.

L’HISTORIQUE DE L’APPROCHE DE LA PSYCHOLOGIE DU CHANGEMENT

INTRODUCTION
Cette approche interculturelle est née durant les années 80 dans le cadre du travail préventif au sein des Associations Jeunesse Parents Conseils à Lausanne et à Sion. Dans certains groupes de recherche, les participants ont essayé d’utiliser les concepts de Friedrich Liebling et de les développer. La collaboration dans de grands projets de prévention (en Suisse dans le cadre du service téléphonique pour enfant et en Afrique avec ENDA GRAF ) ont conduit les collaborateurs des AJPC à un amer constat : la faillite de nombreuses opérations de développement psychologique, social et économique. Malgré les connaissances psychologiques, sociologiques et anthropologiques, la société humaine reste divisée en deux :

Au niveau mondial – entre le Nord, riche, et le Sud, pauvre ;
Au niveau de la société – le principe de l’exclusion à tous les niveaux de la société ;
Au niveau interpersonnel et individuel (dualisme, hiérarchie).

COMMENT CHANGER LA SOCIETE ?
Philippe Deleener et Emmanuel S. Ndione expriment dans le plan d’action de ENDA :  » Nous avions été amenés à réaliser que nous étions, en tant que personnes, le principal outil de changement « , d’où la liaison avec le changement personnel et l’approche de la psychologie du changement. Cette réflexion nous amène à nous poser, entre autres, les questions suivantes :

Si les personnes conscientes de la nécessité de changer ne peuvent pas provoquer ce changement chez elles, quel est le problème ?
Comment les personnes peuvent-elles devenir des outils de changement ?
Pourquoi les personnes ont-elles une telle difficulté à changer ?
Est-ce que les connaissances ne provoquent pas un changement chez la personne ?
Qu’est-ce qu’il faut pour que la personne puisse changer ?

ON NE DEVELOPPE PAS, ON SE DEVELOPPE
Toute personne avisée se rend compte du fossé entre la théorie et la pratique en psychologie.
Celui qui a pu expérimenter lui-même une psychothérapie se rend compte que faire ce qu’on sait est difficile ;
En tant que conjoint ou parent, le fossé entre la théorie et la pratique est douloureusement ressenti ;
En tant que professionnel, toute la bonne volonté et un manuel éthique de cent pages n’empêchent pas le dysfonctionnement personnel et institutionnel ;
Le collègue qui proclame son désir d’entretenir des relations horizontales n’échappe pas à ses aspirations de grandeur ;
La liste est sans fin.

LA CONCEPTION DE L’ETRE HUMAIN DANS L’APPROCHE DE LA PSYCHOLOGIE DU CHANGEMENT

INTRODUCTION
Ce terme de la conception ou connaissance de l’être humain en psychologie à été créé par Adler au début de notre siècle et l’un de ses livres porte le titre de  » Menschenkenntnis  » :  » la connaissance de l’homme « . Dans la psychologie du changement, ce concept prend une importance toute spéciale. On peut considérer le concept de l’être humain, ou plutôt la connaissance de soi-même et d’autrui, comme la clé de l’approche de la psychologie du changement. La santé mentale peut être considérée comme le degré de correspondance entre la réalité et la conscience que l’individu a de sa conception de lui-même et d’autrui.

Essayons tout d’abord de comprendre comment cette connaissance de l’homme s’acquiert : par une investigation de sa propre connaissance de l’homme. Qu’est-ce que je pense de l’homme ? Comment est-ce que je vois l’homme, l’être humain ? Qu’est-ce que je pense de sa nature, de son comportement, de sa morale ? Quelle est ma conception de l’être humain ?

Sans cette investigation, une véritable recherche sur la connaissance de l’être humain est quasiment impossible.

LA TRANSMISSION DES VALEURS
Durant notre enfance, la conception de l’être humain et de la culture dans laquelle nous vivons, nous est transmise par les actes de nos éducateurs et ce au cours des premières années de notre vie avant que nous ne puissions penser par nous-mêmes et avant que nous ne puissions nous rendre compte de ce qui se passe. Nos éducateurs nous transmettent leurs idées, leurs certitudes, leurs préjugés, leurs peurs et leurs angoisses et c’est ce qu’ils nous lèguent qui constitue la base de notre conception de l’être humain et ainsi notre connaissance de l’homme. Je ne veux pas dire que notre connaissance de l’homme se réduit à ces idées préconçues, car effectivement le processus n’est pas direct et unifactoriel, mais c’est sur la base du comportement de nos parents que nous développons notre propre vision de l’homme. En fait, nous n’avons que ce qu’ils nous donnent comme modèle du comportement humain. Ceci se passe tout au début de notre vie, la première année de la vie humaine est évidemment la plus importante, parce que c’est pendant cette année-là que la première base de la pensée et du comportement humain est constituée au sein d’une relation entre un adulte et un bébé fragile et entièrement dépendant de lui. Sans cet adulte, le bébé ne peut pas survivre, alors sa vie dépend de cet adulte. Le bébé ne dépend pas seulement physiquement, mais également psychiquement de cet adulte. N’ayant que quelques réflexes à sa disposition au moment de sa naissance, il ne peut apprendre ce dont il a besoin afin de devenir un adulte qu’à travers leur relation. Le bébé humain ne peut pas choisir ce qu’il veut penser ou sentir. Il sent et pense sur la base de ce que l’adulte lui permet de vivre, de sentir et de penser. A l’âge de 5 ans, la conception de l’être humain est constituée chez l’enfant et quand il va au jardin d’enfants, il vit cette première communauté au-travers du filtre de la conception de l’être humain que ses parents lui ont transmise.

LE PLAN DE VIE
Nous devons le concept de plan de vie à Alfred Adler. Il est intéressant car il nous permet de comprendre pourquoi un individu ne change pas ses convictions profondes malgré le poids de la réalité. Le plan de vie est adopté très tôt dans l’enfance, on peut dire qu’à 5 ans, il est déjà construit. Ce plan de vie va par la suite diriger la vie de l’individu ; simplement exprimé, il s’agit de la réponse de l’individu face à son environnement affectif et social. Le plan de vie dans une société bâtie sur l’idée de la différence et du pouvoir est forcément centré sur l’idée de la dichotomie entre le faible et le fort, l’intelligent et le bête, le riche et le pauvre, le premier et le dernier, etc … Dans cette société, l’individu tâche toujours d’éviter la position faible et d’atteindre la position forte.

Comme je viens de le dire, ce processus n’est, fort heureusement d’ailleurs, pas un processus unifactoriel. Le bébé est en relation avec ses parents, une relation qui est créée par les deux partenaires, bien que l’un soit dépendant de l’autre et physiquement et psychiquement très fragile, mais la relation interpersonnelle est toujours une création à chaque fois nouvelle mais dans un cadre bien défini, celui des êtres vivants, mammifères et donc sociaux. Ainsi, le bébé accueille ce que les adultes autour de lui transmettent par leurs actes et leurs comportements, leurs sentiments et leurs manières de réagir, et il essaie de se faire une idée de ce qu’est l’être humain. Est-ce qu’il est sécurisant ? Est-ce que l’on peut se fier à lui ? Est-ce qu’il l’accepte ? Est-ce qu’il émet des conditions, lesquelles, comment ?

Ainsi, nous disons très clairement que l’éducation est primordiale dans cette approche.

Cela veut dire que nous devons nous rendre compte de la conception de l’homme et du monde que nos parents ont eue afin de pouvoir nous rendre compte de la nôtre.

Comment peut-on déterminer la conception sous-jacente ?

Nous avons constaté (comme la plupart des autres spécialistes dans le domaine) que c’est l’attitude (notre attitude, l’attitude de nos parents) qui transmet la conception que nous avons de l’homme, du monde et de l’éducation. Nous éduquons les enfants en correspondance avec notre image de l’homme. En général, nous pensons devoir guider nos enfants sur le bon chemin puisque nous avons été éduqués de cette façon et selon le même modèle.

Qu’est-ce que cela veut dire, le bon chemin ?

Le bon chemin est, en général, l’obéissance.

Que signifie l’obéissance ?

L’obéissance veut dire que l’un indique, contrôle, gère, punit et récompense, juge et évalue le comportement de l’autre. L’obéissance est un comportement et un état d’esprit basé sur une conception de l’être humain en tant qu’être sauvage qu’il faut dresser. L’enfant doit obéir, être sage, se comporter selon nos règles. L’enfant qui ne se comporte pas selon notre vision est un enfant mal élevé. On peut dire que la plupart des activités de l’enfant sont considérées comme des inconvenances, des mauvaises manières : l’enfant qui s’oppose, l’enfant qui ne se dépêche pas quand on le lui demande, l’enfant qui ne veut pas aller à l’école, l’enfant qui ne veut pas mettre son bonnet quand on le lui indique, etc. etc. etc.

Notre premier réflexe est de réprimer, punir ou (et cela est la même chose ou presque) récompenser le comportement de nos enfants. Cette attitude est un symptôme d’une certaine conception : il faut dresser, pousser, inciter l’enfant à être bon, sage, bien élevé.

En réalité, l’enfant apprend d’après le modèle qu’on lui donne. Et cette petite phrase n’est pas anodine, car cela veut dire que les symptômes de notre enfant reflètent notre modèle.

APPRENONS A LIRE ET A COMPRENDRE LES SYMPTOMES
En conclusion, vouloir forcer ou penser devoir forcer l’enfant à faire ce qu’il ne veut pas, est déjà une très grande violence à son égard, une humiliation, un procès d’intention, une violation de la nature sociale d’un petit être totalement dépendant de nous.

LA RECHERCHE PSYCHOLOGIQUE DANS L’APPROCHE DE LA PSYCHOLOGIE DU CHANGEMENT

INTRODUCTION
Il n’est pas aisé d’expliquer la méthode de recherche en psychologie lorsqu’il s’agit de la psychologie du changement.

La recherche en psychologie comme nous la pratiquons dans nos centres est une recherche commune. Tous les participants du groupe de recherche sont des chercheurs au même titre, car il ne s’agit pas seulement de connaissances formelles, mais d’une méthode d’approche du développement de sa personne.

Bien sûr, un novice ne connaît pas autant de choses qu’un participant d’un semestre plus avancé. Bien sûr, il y a des différences immenses entre le savoir d’un débutant et le savoir de quelqu’un qui a consacré des décennies à cette recherche.

Il ne faut pas sous-estimer les connaissances formelles, car il est très important pour l’étudiant en psychologie du changement d’acquérir des connaissances en histoire, en méthodologie, en sciences naturelles, en anthropologie, en sociologie, en ethnologie et surtout en psychologie, y compris les grandes théories de la psychologie de notre siècle.

Afin de donner des outils et des moyens d’auto-analyse, d’analyse des relations intra-psychiques, interpersonnelles, interculturelles et interdisciplinaires, notre prise en charge comprend toujours une introduction à :

La connaissance de l’homme ;
La connaissance du monde ;
La psychologie des profondeurs, humaniste, systémique et cognitive ;
La psychologie de l’éducation ;
L’étude des valeurs culturelles (principes d’éducation, etc.) ;
L’étude de l’histoire de l’humanité et l’étude de la pensée historique ;
L’analyse de nos démarches d’entraide et d’action.

LA METHODE DE RECHERCHE
Pour nous, la recherche en psychologie est une attitude, plus qu’un savoir ou une méthodologie. Nous allons comparer nos sentiments et nos opinons à la lumière de la connaissance de l’homme accessible de nos jours. Cela ne veut pas dire que chacun donne son point de vue ou dit ce qu’il pense sur n’importe quel sujet. Non, chaque individu doit essayer de comprendre les connaissances de la conception de la nature humaine de la psychologie moderne et leurs conséquences sur sa vie, sa manière de faire et de voir. Il doit comparer ses opinions conscientes et inconscientes (qui se manifestent par exemple dans des situations de crises ou de stress !) à la lumière de la conception de la nature humaine. Est-ce que ce que j’ai appris correspond à ce que je découvre en science psychologique ? Est-ce que je suis capable de bien définir mes opinions cachées, mon agenda caché ? Comment faire pour approcher ses sentiments et ses opinions sans rester sur la surface des déclarations ?

Néanmoins, nous appliquons les mêmes méthodes que les autres disciplines, celles de la recherche empirique :

La déduction et l’induction
L’observation engagée dans le sens de la recherche en anthropologie
Le questionnement structuré
L’écoute structurée ou bien la récolte structuré des données
La discussion critique

LA DEDUCTION
La méthode de la déduction est un raisonnement par lequel on essaie de faire l’inventaire de toutes les conséquences découlant d’une hypothèse par un raisonnement rigoureux.

L’INDUCTION
La méthode de l’induction consiste en un raisonnement rigoureux par lequel on infère une chose à partir d’une autre. Il s’agit d’aller des effets à la cause, des faits particuliers aux lois qui les régissent.

L’OBSERVATION
L’observation en tant que méthode scientifique veut dire observer dans un but scientifique, c’est-à-dire étudier avec attention. La méthode clinique en psychologie se fait par exemple par l’étude prolongée de cas individuels. Il y a deux procédés : l’observation de situations naturelles ou concrètes (par exemple en anthropologie) ou les situations d’expérimentation ou de test.

L’entretien est par excellence une technique clinique en psychologie. L’observation méthodique doit être incluse. Cette technique peut être salutaire dans la vie quotidienne. En se posant en tant qu’observateur (de soi-même par exemple) dans une situation de conflit, l’individu peut prendre du recul. Dans un cadre clinique ou d’un groupe de développement personnel, l’observation peut se faire par le recueil de témoignages multidisciplinaires. L’observation peut devenir plus formelle en posant certains principes et un cadre scientifique.

Dans la famille, comme technique dans la vie courante par rapport à l’éducation, les membres de la famille peuvent s’attribuer des tâches et ainsi observer les comportements dans une situation donnée.

En anthropologie, la technique de l’observation participative a été décrite par les chercheurs de la deuxième moitié du 20ème siècle. Cette méthode de la recherche anthropologique consiste à vivre parmi un groupe de personnes, de faire ce qu’ils font dans la mesure du possible, et avec l’accord des concernés et de noter minutieusement ce qui se passe. Le résultat de cette observation scientifique s’appelle une ethnographie. Une tâche essentielle de l’ethnographe est d’apprendre la langue de la population dans laquelle il veut faire sa recherche, car apprendre une langue veut dire, dans une certaine mesure, apprendre la manière de penser de cette population.

UN EXEMPLE DE LA PENSEE PRE-DARWINIENNE
Un exemple de la pensée pré-darwinienne est l’idée que la structuration du psychisme de l’homme fait appel à la notion de  » fixer des limites à l’enfant « , notion très en vogue aujourd’hui. Le psychisme de l’enfant n’a pas besoin d’être structuré de façon artificielle, car il est structuré par l’évolution du vivant sur la planète Terre. C’est banal, mais la structure du psychisme de l’enfant 2003 est le même, identique à celui de l’homo sapiens âgé d’environ 40 000 ans. La flexibilité en est donc son plus grand critère.

SUJET DE RECHERCHE ET CHERCHEUR
Est-ce que mon comportement dans ma vie de tous les jours correspond à ce que je prétends savoir ? Comment expliquer ce paradoxe ? Comment je me l’explique moi-même, par exemple quand je fais des reproches à mon collègue ou mon conjoint ? Si la nature de l’homme est sociale et que chacun fait de son mieux, comment j’explique que je persiste à accuser l’autre de ne pas bien faire ? Est-ce que je suis capable de voir que j’accuse l’autre ?